Page I
Le passager
Passager en première classe d'un train du passé,
A vive allure sans arrêts et sans destination,
Défilent de vaporeux paysages sombres et floutés,
Traversant l'intemporel et de funestes saisons.
Je suis ce passager en première classe,
Au destin anéanti sans billets et bagages,
Le cœur vide dans un esprit de glace,
Où vibrent des voix et brillent d'anciens visages.
Dans sa dynamique le dragon de fer crache sa fumée noire,
Crisse ce long charroi où il n'y a ni chauffeur ni équipage,
De lourdes tentures de velours et de larges miroirs,
Où se cachent et reflètent des ombres sans âge.
Je chuchote, je chante et fredonne de veilles mélodies,
Je me raconte une vie sans intérêt et sans passion,
Je fais des gestes galants en récitant d'antiques poésies,
Tout mon univers demeure ici dans ce funèbre wagon.
Je ne suis qu'un passager oublié d'un autre temps,
Un ectoplasme, un souffle froid qui hante avec mélancolie
Ce train invisible qui me berce avec ses bruits de roulements,
Une solitude teintée de voyages inachevés où s'étiole ma nostalgie.
The passenger
A passenger in first class on a train from the past,
Racing at full speed, without stops and without destination,
Fleeting, vaporous landscapes, dark and blurred,
Crossing the timeless and the dire seasons.
I am this passenger in first class,
Destiny shattered, with no tickets and no luggage,
A heart empty in a mind of ice,
Where voices echo and old faces shine.
In its motion, the iron dragon spits its black smoke,
Screeching, this long procession where there is no driver or crew,
Heavy velvet curtains and wide mirrors,
Where shadows of no age hide and reflect.
I whisper, I sing, and hum old melodies,
I tell myself a life without interest and without passion,
I make gallant gestures while reciting ancient poems,
All my world remains here in this funereal carriage.
I am but a forgotten passenger from another time,
An ectoplasm, a cold breath that haunts with melancholy
This invisible train that rocks me with its rolling sounds,
A solitude tinged with unfinished journeys where my nostalgia withers.